Il est des rencontres qui ne s'imposent pas d'emblée; comme celle qui m'a fait croiser une VX-800...
Je l'avais trouvé plutôt jolie quand elle est sortie, début 90, mais sans qu'elle me fasse suffisament de l'oeil pour que je l'aborde vraiment.
Petite, comme moi et longue comme ma... prose...
Propre sur elle, étroite de bassin; deux belles... sorties d'échappement.
La presse moto n'était pas ditirambique non plus: Présentation d'une basique à pas bien cher; le cul assis entre deux chaises.
Un truc pas si bien fini et plutôt à finir par des accessoires qui vont agrémenter son cardan à visée "roule toujours" ou, au contraire, à renforcer son coté custom pas pratique par des accessoires pour qu'on la regarde un peu plus.
Un quart de siècle bien dépassé plus tard, me voilà le cul dessus...
Ma recherche: Une machine à cardan, plutôt confortable, qui me permet de toucher les deux pieds par terre, fiable et avec un peu de personnalité.
Comme je suis un retraité fauché, faut pas que mon vice me coûte plus cher qu'un divorce à l'amiable et me voila donc confiné à des restants de motos.
La première que je teste est une Honda ST1100.
Elle été garée légèrement en devers, sur sa latérale.
Un gabarit assez impressionnant pour le petit mec que je suis et une selle très large.
Résultat: Les deux bouts de pieds seulement en contact avec ma terre nourricière...
Comme elle est en devers coté latérale, je réalise immédiatement que cette enclume de 340 kilos sera une séance de musculation à chaque prise en mains.
J'en fais part à mon vendeur, l'avisant que ma première impression est dissuasive.
Faut dire que j'aurai à manoeuvrer en terrain un peu hostile pour mes rentrées-sorties du garage, avec demi-tours à l'intérieur de celui-ci...
Il me rassure: Elle ne pèse plus grand chose une fois sur la route.
Le pire, c'est que ce n'est pas faux et que passé 30 km/h, ça se gère, sinon comme un vélo, tout du moins sans grand souci.
Je fais mon tour: Confort pulman, moteur volontaire mais sans grand caractère, boite et cardan agréables, freinage correct.
Mais mon constat lucide, c'est qu'il ne faut pas que je me pose la question de "Si je vais la foutre par terre dans mes manipulations à basse vitesse" mais... Quand et à quelle fréquence...
Conclusion: Il me faut un truc plus gérable et plus facile à bouger dans mon garage et son approche et que je sois à même à faire reculer sans demander de l'aide.
C'est alors que rentre en scène VX-800; celle que je n'attendais pas et qui m'a invité à la chevaucher pour une luxure qui n'explore pas toutes les pages du Kamasutra mais dont les vibrations font du bien !
On s’est donné rendez-vous derrière l’église ; signe d’une relation coupable à venir.
On ne va pas se mentir : Ce n’est pas la plus belle fille du monde et je suis loin d’être le premier à la monter.
Son réservoir porte des stigmates non soignés, de plus en plus couleur rouille.
Il est rouge quand le reste de celle qui a été belle est noir.
En rouge et noir, j'exilerai ma peur ;
J'irai plus haut que ces montagnes de douleur…
Je la démarre et cela se passe dans la sonorité caractéristique d’une distribution vieillissante.
Cette maladie vénérienne de vieille rombière associée à son allure peu avenante aurait dû me faire tourner les talons mais, puisque j’avais fait la route jusqu’à elle et que je n’avais jamais essayé cette saveur de moto, je pars faire un tour.
La selle est relativement étroite et je suis plutôt bien installé, mes 168 cm m’autorisent à avoir un pied bien au sol quand l’autre est un peu relevé coté talon.
Je dois avancer un peu le buste pour atteindre le guidon.
Première dans un petit claquement mais boite douce ; les premiers mètres manifestent immédiatement une direction qui engage fortement, avec une sensation de lourdeur sans rapport avec le poids réel de la bête.
Le couple moteur se fait bien sentir, à défaut d’une puissance monstrueuse.
Mais j’apprécie immédiatement son caractère que je qualifierait de « double mono ».
C’est sans doute le calage de vilebrequin qui veut ça mais j’ai vraiment l’impression d’un mono qui n’aime pas les trop bas régimes pour lui mais qui assène chaque coup de piston dans ton adn de motard.
Je sais bien qu’il sont deux mais chacun semble jouer sa partition dans son coin et le résultat est original et agréable.
Me voila en train d’enchaîner les méandres d’une petit route torturée autant par la variété des circonvolutions que par ses variation de supports, alternant différents âges de revêtements et pas mal d’affaissements de terrains et autres saignées.
Cela se confirme : Direction de camion, cap à peu près imperturbable, fourche un peu dure à l’attaque mais pas tant que ça à la plongée, frein à l’ancienne, doux et progressifs sans être très puissants.
Mais je tombe sous le charme de ce moteur anachronique et de son irrégularité cyclique.
Un espèce de truc mal foutu dans l’absolu mais qui touche les tréfonds de ton âme de motard.
Le résultat de tout cela, c’est que tu fais le plein de sensations alors même que tu n’as pas été obligé d’envoyer la purée pour y arriver.
Cela tombe assez bien parce que la protection est celle d’un roadster et c’est tant mieux d’avoir le buste penché en avant, ce qui fait une contre réaction à la pression du vent.
Mais il est clair que le truc peut vite devenir inconfortable à haute vitesse et je ne pense pas aller bien plus vite avec qu’avec mon 400 Burgman que je viens de laisser tomber.
Je constate également que je fais bien d’avoir des courtes pattes, finalement.
Mes jambes sont limite trop pliées et je trouverai sans doute la position défectueuse si j’avais des fémurs plus longs.
Retour derrière l’église, partagé entre mon intérêt pour le modèle et mes réserves par rapport à l’état objectif de cet exemplaire.
Mon vendeur, très sympa au demeurant, en veut 950 euros mais je ne suis pas disposé à les lâcher, compte tenu de mes constatations, coté cosmétique comme mécaniques.
Mais je comprends tout à fait que ce n’est pas cher pour une moto dont les pneus ont moins de mille kms, tout comme la révision récente de la fourche, la batterie neuve.
Bref, je n’avais guère le cœur de travailler au corps mon vendeur, comprenant qu’il fallait qu’il y trouve également son compte et m’apprêtais à repartir sans.
Mais j’apprends qu’il possède aussi une Yamaha 600 XT éparpillée façon puzzle à remonter et qu’il n’a pas les compétences pour le faire.
Comme je les ai…
Je vais donc rentrer dans mon garage, non pas une mais deux motos ; mon intervention sur la seconde participant à moitié au financement de mon achat.
Affaire faite, à la satisfaction des deux parties !
